Le cheval fait partie des espèces dont la saison de reproduction est saisonnière. Influencée par la durée du jour, la venue en chaleur des juments intervient au printemps de sorte que les poulains naissent au terme d’une gestation de 11 mois pendant la période de pousse de l’herbe. Cherchant à produire les poulains les plus précoces, les éleveurs de galopeurs mettent les juments sous lumière en hiver pour avancer les premières chaleurs et faire saillir dès février pour des poulains à naitre à partir de janvier. Les élevages de grande taille disposent d’installations dédiées au poulinage avec boxes spacieux et systèmes de surveillance moderne pour alerter l’éleveur au moment de la parturition. Pour un éleveur débutant, il est impératif d’anticiper ce moment; de préparer ses installations, de connaitre les points à surveiller et de savoir comment intervenir et, comme nous allons le voir, comment éviter de trop intervenir.

Préparer ses installations pour le poulinage

Comme toute naissance, un poulinage est toujours un moment particulièrement chargé en émotions. Même si dans l’espèce équine, la mise-bas se passe naturellement bien dans la majorité des cas, tout éleveur sera un jour ou l’autre confronté à un imprévu qu’il faut anticiper au maximum pour qu’il ne se transforme pas en drame.

En effet, plusieurs types de dystocies (anomalies lors de la mise bas) peuvent survenir : un mauvais positionnement du poulain comme un positionnement sur le dos ou en siège mais la majorité des problématiques au poulinage sont dues au fait que les jambes du poulain sont proportionnellement très longues et que si l’une d’elle n’est pas correctement positionnée, elle va bloquer l’avancée du poulain dans la filière pelvienne. Sans intervention, c’est la mort du poulain et de sa mère. Le maître mot dans cette situation : rapidité. Une intervention vétérinaire rapide pourra sauver le poulain ou, à défaut la poulinière.

Anticiper le poulinage : c’est d’abord préparer ses installations. Disposer d’un boxe spacieux car la majorité des juments connait une période d’agitation intense juste avant de pouliner. Elles se couchent et se relèvent parfois plusieurs fois et doivent se sentir à l’aise pour garder leur calme. Un box de 4m x 4 m constitue le minimum pour des chevaux de taille moyenne. On veillera à ce que l’éclairage soit suffisamment efficace pour qu’un vétérinaire puisse intervenir dans de bonnes conditions de visibilité même en pleine nuit. Comme le poulain nait dépourvu d’immunité, la propreté du box est capitale pour éviter les septicémies précoces. Un point d’eau à proximité sera également apprécié pour une intervention en urgence.

On pourra également s’équiper de systèmes d’observation à distance ou de détection du poulinage pour ne pas passer à côté du moment important.

Prévoir le moment du poulinage

Le cheval est une proie et à ce titre, la jument reste particulièrement discrète sur les signes annonçant le poulinage, moment où elle est particulièrement vulnérable. Ce qu’il faut garder à l’esprit est qu’il n’y a pas de signe ou de règle absolue pour prévoir le moment du poulinage. Chaque jument se comporte un peu différemment. L’éleveur surveillera certains signes :

La jument « se casse » au niveau de la croupe. Ceci est du à une hormone, la relaxine, produite par le placenta qui entraîne un relâchement des tissus et des ligaments visible au niveau de la croupe de la jument. Le moment du poulinage approche. De la cire (colostrum coagulé) apparait au niveau des mamelles.

Les sécrétions mammaires sont le meilleur critère de prédiction du poulinage mais elles ne permettent pas de donner le jour exact.

Il faut prélever du lait tous les jours, à la même heure, pour observer sa couleur, sa consistance et mesurer sa concentration en calcium. En effet, on sait que la concentration en calcium et en magnésium augmente dans les jours précédant le poulinage. Ainsi, grâce aux résultats donnés par le test avec des bandelettes de mesure de concentration de calcium, il est possible d’organiser la surveillance du poulinage de façon plus précise.

90 % des poulinages ayant lieu la nuit, les élevages spécialisés utilisent les nouvelles technologies avec:

  • Ceintures de poulinage (détection de la position couchée)
  • Caméras de surveillance
  • Système de détection vulvaire (détection de l’ouverture de la vulve)

Aucun outil n’est infaillible et ne remplace une surveillance attentive. Mais autant mettre toutes les chances de son côté.

Intervenir le moins possible

Ça y est, le poulain est né ! Emotions garanties chez l’éleveur surtout si c’est son premier poulinage. En dehors des soins d’hygiène (désinfection du cordon ombilical et vaccins), il est urgent de ne rien faire. Plusieurs expérimentations ont montré que plus on intervient sur le poulain nouveau né, plus on le stresse. Ce stress très précoce va avoir des conséquences très significatives sur son comportement adulte avec un cheval aux comportements assez imprévisibles.

La méthode d’imprégnation

La méthode d’imprégnation précoce qui consiste à manipuler très tôt le poulain en simulant la selle, la sangle, en lui prenant les pieds de force etc a en fait des conséquences délétères importantes sur son comportement ainsi que sur la sécurité de ses futurs propriétaires ou cavaliers. En effet, ce poulain stressé va rester « collé à sa mère » pour se rassurer. Il va donc venir peu au contact de ses congénères et apprendra mal les comportements et postures « normales des chevaux ». Il aura notamment peu de finesse dans ses réponses comportementales.

Par exemple, au lieu de baisser un peu les oreilles, puis plus franchement, pincer les lèvres, faire une menace puis un mouvement de tête avant une tentative de morsure quand on le dérange, il ne va pas prévenir pendant un moment (immobilité) puis mordre d’un coup sans crier gare.

Une surveillance éloignée

Il est donc préférable de surveiller de loin que le lien mère /jeune s’établit de façon harmonieuse de façon à ce que le poulain en confiance explore de sa propre initiative ses congénères et son environnement. Il deviendra alors un cheval moins peureux et aux réactions plus prévisibles donc un cheval plus sécuritaire pour l’homme.

Préparation et installation poulinage
Préparation et installation poulinage
Préparation et installation poulinage

Le mot de la fin sur le poulinage

On dit souvent que la nature est bien faite mais pour prévenir les drames qui peuvent « naturellement » survenir, l’éleveur avisé préparera des installations offrant confort et fonctionnalité en cas de besoin d’intervention. Il passera quelques nuits courtes à l’approche du poulinage. Si il a la chance d’y assister, prendre une posture d’observateur distant sera la meilleure chose à faire pour l’équilibre émotionnel du poulain. Il aura ensuite tout intérêt à se servir de la mère comme d’une alliée pour approcher le poulain de façon indirecte.

En s’occupant de la mère, il demeure émotionnellement neutre pour le poulain. Ce dernier, naturellement curieux viendra de lui-même explorer ce curieux bipède que sa mère semble apprécier. C’est le début d’une relation qui part sur de bonnes bases.